
Dans les pas d’Alfred Nobel
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 1 juillet 2025 11:01
- Écrit par Claude Séné

Y penser toujours, n’en parler jamais. Donald Trump en est persuadé, il mérite largement le prix Nobel de la Paix, qu’il aurait dû recevoir dès son premier mandat pour l’ensemble de son œuvre, sans la partialité évidente du comité chargé par le parlement norvégien d’attribuer le prix. Selon lui, et pour conjurer le mauvais sort, le Nobel de la Paix est toujours décerné à une personnalité « de gauche », une catégorie englobant les plus modérés des démocrates, dont il ne fait en aucun cas partie. Cet ostracisme doit paraître profondément injuste au milliardaire américain, qui, après tout, ne ferait rien d’autre que de chercher un apaisement des conflits pour favoriser les affaires.
Comme Alfred Nobel, qui aurait cherché à compenser sa mauvaise conscience d’inventeur de la dynamite en créant les différents prix qui portent son nom, Donald Trump se pose en faiseur de paix, malgré des fortunes diverses. Il essaie d’imposer par les armes ce qu’il n’obtient pas par la négociation ou le rapport de forces. De son point de vue, il mérite largement autant le prix que son lointain prédécesseur, Barak Obama, qui l’a obtenu en 2009 avant même d’avoir fait quoi que ce soit, en raison de l’espoir soulevé par son élection. De la même façon, le prix a parfois récompensé des illustres inconnus, voire des institutions ignorées du grand public, comme la confédération des victimes survivantes des bombes nucléaires au Japon, en 2024. Autre curiosité, l’absence remarquable au palmarès de Gandhi, plusieurs fois cité, mais décédé en 1948 avant de revoir la distinction qui lui semblait promise. Le prix ne sera pas décerné cette année-là, comme pendant les deux guerres mondiales, et certaines années « creuses » où personne n’a semblé au comité digne de recevoir le prix.
Cependant, seules deux personnalités ont refusé la distinction. La première, Jean-Paul Sartre, pour des raisons de principe, il refusera également la Légion d’honneur, la seconde, Lê Duc Tho, négociateur nord-vietnamien des accords de paix de Paris, alors qu’Henry Kissinger, nommé conjointement en 1973, l’acceptera sans vergogne, malgré son rôle reconnu d’immixtion dans les affaires du Chili quand Pinochet renversait Allende en le faisant assassiner au cours du coup d’État. Donald Trump n’en est pas là, au moins pas encore, si l’on excepte la tentative ratée de s’emparer du Capitole pour s’accrocher illégalement au pouvoir après sa défaite électorale. On peut même se demander si cela aurait dissuadé le comité Nobel de lui attribuer le prix, si l’on tient compte de la présence insolite dans les candidats pressentis de Benito Mussolini en 1935 ou d’Adolf Hitler en 1939, et de Joseph Staline en 1945 puis en 1948. On préfèrera se souvenir des lauréats qui ont reçu un coup de pouce ou une reconnaissance dans leur juste combat pour la démocratie.